GENEVE – L’expulsion, de force sans jugement, de son sous-locataire n’est pas légale, qu’il ait ou non un permis d’établissement
Question de Miguel V. à Genève : « Je suis sous-locataire d’un appartement depuis 12 mois et sans permis d’établissement. Comme je n’ai plus pu payer mon loyer, car j’ai perdu mon emploi vu la crise sanitaire, le sous-bailleur m’a demandé avec insistance de lui rendre son appartement. Comme j’ai refusé, il a changé la serrure. Est-ce juste ? »
Non, le sous-bailleur n’a pas le droit d’expulser son locataire de force sans jugement : il doit d’abord résilier le bail en respectant les formes légales, même si le bail n’est pas écrit mais découle d’actes concluants (donner des clés contre un loyer). Puis demander l’évacuation du sous-locataire au Tribunal. Notre lecteur est victime d’une violation de domicile, infraction punie de 3 ans d’emprisonnement selon l’art 186 du Code pénal suisse. En effet, en cas de sous-location, l’appartement est le domicile du sous-locataire et non pas du locataire. Le sous-bailleur commet également une infraction de contrainte au sens de l’art 181 CP, voire de menace (art 180 CP).
Le sous-locataire, même sans permis de séjour, devrait pouvoir demander l’assistance de la police, cantonale ou municipale pour entrer à nouveau dans son appartement, si nécessaire avec l’aide d’un serrurier. Il serait opportun en ces temps difficiles que la police ne se montre pas zélée quant au statut légal d’une personne évacuée sauvagement. Il ne serait ainsi pas nécessaire que le sous-locataire soit contraint de déposer une requête en mesures provisionnelles urgentes au Tribunal des Baux et loyers, déjà bien débordé.
Le Code civil protège également le possesseur de l’appartement, soit le sous-locataire ; l’art 926 du Code civil permet au possesseur de repousser par la force tout acte d’usurpation ou de trouble. Le sous-locataire « peut, lorsque la chose lui a été enlevée par violence ou clandestinement, la reprendre aussitôt, en l’arrachant au spoliateur surpris en flagrant délit ou arrêté dans sa fuite ». Le sous-locataire, selon les circonstances, notamment s’il possède (sur lui !) un contrat de sous-location écrit ou des quittances de paiement du sous-loyer, peut donc mandater directement un serrurier pour faire changer à nouveau les serrures.